21

Nick se tenait derrière le comptoir lorsque Teresa descendit boire un verre en milieu de soirée. Elle lui demanda un club soda. Il lui servit donc un verre rempli de glaçons et le remplit avec son siphon. Elle fit tournoyer les cubes de glace et le regarda droit dans les yeux. Il se demanda ce qui allait lui tomber dessus. Lorsque Amy lui jetait un tel regard, cela ne présageait rien de bon. Heureusement, un autre client s’approchait du bar : il éluda donc la question en allant le servir. Apparemment, Teresa avait compris son manège : lorsqu’il revint, elle était allée s’asseoir devant une des tables et ouvrit le livre qu’elle avait apporté.

Le bar se vida petit à petit et, une demi-heure avant la fermeture, il ne restait presque plus personne. Nick ramassa les verres et les cendriers, les lava, essuya le comptoir. Teresa le regarda faire et vint se percher sur son tabouret habituel. Cette fois-ci, il n’y couperait pas.

« Puis-je vous poser une question, Nick ? demanda-t-elle.

— Ai-je vraiment le choix ?

— Je crains que non. Pourquoi est-ce que personne ne parle jamais du massacre ?

— Que voulez-vous qu’on en dise ?

— Pas grand-chose, en tout cas. Tout le monde fait comme s’il ne s’était rien passé. » Elle but une gorgée avant de reprendre : « Bon, je sais. Je ne suis qu’une Américaine barbare et n’ai pas le droit de poser des questions. Mais la plupart des gens d’ici n’ont rien à dire.

— Vous pouvez m’inclure dans la liste.

— Mais pourquoi, Nick ?

— Dans mon cas précis, je n’étais même pas en ville lorsque cela s’est produit. J’étais…

— Non, ça, vous me l’avez déjà raconté. Vous n’étiez pas là, certes, mais le simple fait que vous soyez resté par la suite indique que, présent ou pas, le massacre a eu un effet déterminant sur votre existence.

— Puisque vous le dites.

— Inutile de jouer à ça. Bon sang, si c’est ce que vous pensez, pourquoi ne pas vous en aller une bonne fois pour toutes ? »

Nick repensa à toutes les fois où il s’était posé cette même question et aux discussions qu’il avait eues avec Amy à ce sujet.

« Parce que cet hôtel appartenait à mes parents, qu’il est de mon devoir de le faire tourner, et que cette ville était jadis la mienne…

— Et vous êtes sorti avec Amy lorsque vous étiez gamins, elle-même est revenue à Bulverton pour cette même raison, et maintenant vous n’arrivez pas à partir, comme si quelque chose vous retenait dans cette ville. »

Nick la regarda sans vouloir admettre qu’elle était très, très proche de la vérité. Comment pouvait-elle savoir ?

« C’est bien ça, non ?

— Si l’on veut.

— Écoutez, est-ce que pour une fois, et rien que cette fois, je peux vous interroger sur ce qui s’est passé ce jour-là ? Du moins tel que vous l’avez vécu.

— Je n’étais pas là, répéta-t-il. Je n’y ai même pas assisté.

— Personne n’a pu tout voir, répondit Teresa. Ceux qui étaient aux premières loges n’y ont pas survécu. Et même ceux qui y ont échappé n’ont vécu qu’un fragment de la totalité. Tout le monde me lance la même excuse : je n’ai pas vu grand-chose. La majorité des témoins survivants a quitté la ville. Mais ceux qui sont restés savent exactement ce qui s’est passé.

— Alors pourquoi insister ?

— J’ai une bonne raison d’agir ainsi. Il y a un trou dans toute cette histoire, quelque chose qui ne colle pas, et je veux pouvoir mettre le doigt dessus. J’ai analysé, minuté et replacé tout ce que Grove est censé avoir fait, et cela ne tient pas. Puis-je comparer mes données avec votre propre vision des choses ?

— À vous entendre, on dirait que vous en savez déjà plus que quiconque.

— Il faut que je remette de l’ordre dans tout ça. »

Nick se sentit battre en retraite, mentalement du moins. Mais pourquoi ? Il est vrai que, pour lui, tout ce qui avait rapport au massacre serait toujours de seconde ou troisième main, mais de toute évidence il y avait plus que ça. La perte de ses parents – et surtout la façon dont ils étaient morts – l’avait choqué plus qu’il ne l’aurait cru, et la profondeur de ses sentiments, de son angoisse, avait été un révélateur.

Il avait vécu si longtemps à Londres qu’il croyait avoir échappé pour de bon à ses parents, mais ce n’était pas le cas.

Mais il y avait aussi des profondeurs psychologiques plus sombres, plus glauques, qu’il osait rarement aborder. Elles tenaient à cette sorte de traumatisme collectif que partageait la ville, cette communion dans des souvenirs pénibles que tous préféraient ne plus évoquer, à défaut de pouvoir les surmonter.

Il farfouilla dans son esprit pour trouver les bons termes.

« Ce soir, Amy est de sortie, dit-il. Je suis seul à garder le bar. »

Il eut un geste évasif de la main pour englober le reste du pub.

Teresa jeta un coup d’œil dans la salle. Il ne restait plus qu’un couple assis à l’une des tables du fond et deux jeunes gars qui jouaient au billard. Elle regarda à nouveau Nick, droit dans les yeux.

« S’il y a quelqu’un à servir, je ne vous monopoliserai pas. De toute façon, ce ne sera pas long. »

Il passa aux pompes à bière et se servit une pinte de blonde. Il s’y prit avec un soin exagéré, remplissant son verre à ras bord en faisant attention à ne pas en renverser une goutte. Il sentait le poids du regard de Teresa posé sur lui. Il revint et déposa la pinte sur le comptoir, entre eux deux.

 

« J’ai pu reconstituer l’itinéraire complet de Grove avant qu’il ne se mette à tirer dans le tas, attaqua Teresa. En fait, je peux vous dire tout ce qu’il a fait jusqu’au milieu de l’après-midi, lorsqu’il s’est éloigné de la station-service Texaco. Il en est parti à trois heures vingt-trois. Je suis sûre de l’heure parce que j’ai consulté les archives de la police, et c’est à ce moment précis que le caissier les a appelés. Je peux aussi refaire son emploi du temps à partir du moment où il a ouvert le feu. D’après la police et l’un des témoins, il a tiré ses premières balles à cinq heures quatre, sur London Road. Donc, ma première question est : qu’a-t-il fait entre trois heures vingt-trois et cinq heures quatre – presque deux heures ?

— Vous devez bien savoir où il se trouvait ?

— En partie, oui. Il s’est rendu au bâtiment ExEx de Welton Road. C’est bien ce que vous vouliez dire ?

— Oui.

— Mais il n’y est resté que quelques minutes. Ils enregistrent les entrées et les sorties : j’ai pu voir la copie de la cassette qu’ils ont remise à la police. Puis Grove a descendu la colline à pied pour entrer dans la Vieille Ville. J’ai moi-même refait le même trajet, et cela m’a pris moins d’une demi-heure, même au ralenti. Grove portait ses fusils, mais ils devaient être lourds et il a pu s’arrêter pour reprendre son souffle. Malgré tout, on est loin des deux heures. »

Deux clients venant de la rue entrèrent dans le bar ; Nick interrompit leur conversation pour aller les servir. Lorsqu’il revint, il remplit à nouveau son verre de glaçons et y ajouta un trait de soda.

« Je présume que vous êtes montée vous-même chez ExEx », dit-il.

Elle acquiesça, l’air surpris.

« Comment le savez-vous ?

— Dans une petite ville, c’est le genre de chose qui se remarque. Pour beaucoup, la réalité virtuelle est un phénomène nouveau. Qu’une touriste aille s’y plonger ? Il ne faut pas plus pour alimenter les conversations. »

En fait, c’était Dave Hartland, le beau-frère d’Amy, qui avait vu Teresa entrer dans le bâtiment, mais Nick n’avait aucune raison de croire qu’elle puisse le connaître.

« Ce n’est plus si nouveau, non ? Aux États-Unis, il y a des succursales ExEx dans presque toutes les villes. Lors de mon départ, une chaîne de librairies commençait à vendre les franchises. Et ils essaiment jusque dans les campagnes.

— Peut-être, mais les ExEx restent quelque chose de nouveau, reprit Nick. La plupart des gens n’ont pas l’air de comprendre à quoi ils servent. Moi-même, je ne suis pas sûr d’avoir tout pigé. Mais vous devez les connaître par cœur ? » Teresa resta de marbre, sans rien trahir de ses sentiments. « Comme leur antenne locale reste plus ou moins assimilée à Grove, certains prétendent qu’il faudrait la faire fermer.

— Ils diraient la même chose s’il avait loué des cassettes porno.

— Je le sais bien.

— C’est bon, reprit Teresa, revenons à Gerry Grove. Savez-vous ce que faisait la police durant tout ce temps ?

— Elle devait rechercher l’assassin de Mme Williams et son petit garçon, plus le type qui a mitraillé la station-service.

— C’est la seconde chose que je n’arrive pas à comprendre. La police prétend avoir réagi avec promptitude et efficacité, en prenant en compte tous les paramètres. J’ai interrogé le directeur de la station la semaine dernière, et il maintient que l’enquête a prouvé que la police a fait son devoir. Ce qui est vrai, en gros : j’ai lu le compte rendu. Mais je crois qu’ils ont vraiment déconné. Il n’y avait pas un agent en vue. En deux heures, ils avaient largement le temps de déduire qu’il y avait un maniaque en liberté. Et pourtant, lorsque Grove s’est mis à tirer dans le tas, ils ont réagi comme s’ils ne s’y attendaient pas du tout. Une voiture de patrouille s’est rendue à la station Texaco, mais il n’y avait pas le moindre déploiement policier en ville avant que les premiers coups de fil ne tombent au commissariat. Les agents habituels faisaient leur ronde comme si de rien n’était, point barre. Depuis juin dernier, la plupart des agents impliqués dans le massacre ont été transférés vers d’autres divisions. Pour une organisation au-delà de tout soupçon, on dirait vraiment qu’ils ont quelque chose à couvrir.

— Cette année, pas mal de résidents ont quitté la ville, contra Nick.

— Oui, mais les policiers, c’est autre chose. Ou cela devrait l’être.

— Dans ce pays, on ne cesse de les balader d’une ville à l’autre. Si quelques-uns ont demandé à être transférés dans une autre division, d’autres le seront de toute façon. Dois-je vous faire un dessin ?

— Non. Excusez-moi. Tout ce que je veux, c’est vous parler. Je ne cesse de ressasser tous ces éléments, et cela m’aide de pouvoir les énoncer à voix haute.

— Et je suis là pour vous écouter.

— Oui… mais vous-même savez pas mal de choses.

— Moins que vous ne croyez.

— C’est vous qui le dites. Laissez-moi terminer, parce qu’il y a une troisième chose que je ne comprends pas. Grove ne possédait que deux armes à feu, celles qu’il a utilisées ce jour-là. Il n’y a pas le moindre doute là-dessus : c’est un fait établi. Cette fille qu’il connaissait, cette Debbie…

— Debra, corrigea Nick.

— C’est ça. Debra. Vous voyez bien que vous n’êtes pas si ignorant que vous le prétendez ? Donc : Debra a affirmé que Grove n’avait jamais possédé d’autres armes que les deux qu’il a utilisées ce jour-là. Il en était dingue, il ne cessait de les nettoyer et les graisser. Mais il n’y en avait pas d’autres.

— Personne n’a jamais dit le contraire.

— Jusqu’à présent. Or, pour autant que je sache, il disposait de quatre armes et pas deux. Il s’est servi de deux d’entre elles dans les rues, et ils ont trouvé les deux autres dans le coffre de la voiture qu’il avait volée.

— Est-ce vraiment un point décisif ?

— Je ne sais pas, mais cela m’intrigue. Il s’est servi d’un revolver et d’un fusil d’assaut automatique. Le revolver était un colt All-American, assez réputé aux États-Unis. Le fusil d’assaut était un M16, une arme américaine très connue. Laissons de côté la question de savoir comment il a pu se les procurer dans ce pays – j’imagine qu’avec un peu de volonté il y a toujours moyen de s’arranger. Mais pourquoi en aurait-il deux de chaque ?

— C’est le cas ?

— La police a trouvé un M16 et un colt dans le coffre de la voiture volée, et un M16 et un colt à côté de son cadavre.

— Les mêmes, exactement ?

— Les mêmes marques, oui. Les mêmes modèles, probablement. Je n’ai pas davantage de précisions sur ce point.

— Je suis désolé, mais je doute que ce soit vraiment un tel mystère. Ce doit être les mêmes. Il a dû y avoir une erreur.

— On a retrouvé la voiture de Grove sur Welton Road, à une centaine de mètres de chez GunHo. Elle n’était pas verrouillée. On a isolé les empreintes de Grove un peu partout, y compris sur le fusil et le revolver qui étaient dans le coffre. J’ai vu le rapport de l’officier qui a effectué la recherche. Il n’y a pas d’erreur possible. Et les rapports balistiques prouvent que c’est avec ce revolver qu’il a descendu Mme Williams et son fils, et avec le M16 qu’il a tiré sur le caissier de la station-service. Jusque-là, tout va bien – si j’ose dire. Mais le problème, c’est qu’après le massacre on est tombé sur exactement les mêmes armes.

— Y compris après les analyses ?

— Oui.

— Alors ? Avait-il deux armes ou quatre ?

— D’après la police, il en avait quatre.

— Les avez-vous examinées vous-même ?

— Elles ne sont plus dans cette ville. Au commissariat, on m’a dit qu’ils essaieraient de retrouver l’endroit où elles se trouvent actuellement, mais cela ne semblait guère les passionner.

— Et où voulez-vous en venir ? L’essentiel n’est-il pas qu’il ait pu se procurer ces armes d’une façon ou d’une autre ?

— D’accord, répondit Teresa, je vais vous poser une autre question. Connaissiez-vous Gerry Grove ?

— Non, je ne l’ai jamais rencontré, même quand j’habitais ici.

— Mais dans votre entourage, y a-t-il des gens qui l’ont côtoyé ?

— Oh, oui, plein de gens. Certains d’entre eux fréquentent ce bar. » Nick désigna d’un coup de menton la table de billard où les deux jeunes hommes continuaient leur partie. « Ces types-là étaient à l’école avec Grove. Amy aussi lui avait déjà parlé, si je ne m’abuse. C’était un gars du coin. Mais la plupart des habitants de Bulverton ne le connaissaient que de vue. Il n’avait pas beaucoup d’amis. Après le massacre, lorsque tout le monde a su qui en était responsable, ce fut un choc incroyable. Lorsque vous avez plus ou moins côtoyé quelqu’un toute votre vie, vous ne vous attendez pas à ce qu’il pète les plombs et prenne un fusil.

— Donc, d’après vous, personne n’aurait pu prévoir ce qui s’est passé ?

— Comment voulez-vous que quelqu’un l’ait senti venir ? Grove était comme la majorité de ces jeunes qui vivent dans les collines : il était au chômage, avait souvent maille à partir avec la police – mais rien de sérieux –, il se droguait lorsqu’il avait un peu d’argent, il aimait boire un verre ou deux. Mais c’était un type silencieux. À posteriori, c’est ce qui a le plus frappé les gens : son calme, sa réserve. C’était un fils unique, il ne sortait pas beaucoup de chez lui, il avait toujours l’air solitaire et mal dans sa peau et n’avait jamais grand-chose à dire. Un peu maniaque, d’après certains. Obsessionnel. Il ne cessait de collecter des trucs et des machins et d’établir des listes. Lorsque la police a fouillé chez lui, ils ont trouvé une pile de carnets où il avait écrit des colonnes entières de chiffres. Sa maison était pleine de magazines qu’il ne jetait jamais. »

Nick se tut et regarda son verre de bière.

« Ce n’est pas grand-chose, commenta Teresa. Mais cela a suffi à détourner l’attention de la police. Ils ont bâclé leur enquête et s’en sont sortis avec les honneurs.

— Que voulez-vous dire ?

— N’est-ce pas évident ? Pour commencer, quelles armes a employées Grove lorsqu’il s’est mis à tirer dans le tas ? Lesquelles a-t-il emportées de chez lui, lesquelles a-t-il laissées dans sa voiture lorsqu’il est entré dans le bâtiment ExEx, et lesquelles a-t-il apportées en ville ? Le fusil qu’il a utilisé à la station-service est-il le même qui a tué tous ces gens dans la rue ? Et le revolver dans les bois, était-ce le même ? Sinon, où se l’est-il procuré ? Lesquels a-t-il laissés dans la voiture ? Comment deux armes différentes peuvent-elles donner les mêmes résultats aux tests balistiques ? Et ce n’est pas tout, il faut expliquer l’inefficacité de la police. En apprenant qu’il y avait eu une fusillade à la station-service, pourquoi n’ont-ils pas bloqué les routes ? Ils auraient pu l’arrêter sans plus tarder. Lorsqu’il a ouvert le feu en pleine ville, pourquoi n’ont-ils pas déployé des hommes en armes dans les cinq ou dix minutes qui suivirent ?

— J’imagine qu’on ne procède pas ainsi chez nous, répondit Nick, constatant et déplorant son ton guindé. Du moins pas si rapidement.

— Exact, et Gerry Grove peut s’en donner à cœur joie sous le nez de tous ces Britons si distingués.

— Parce que cela n’arrive jamais aux États-Unis ? rétorqua Nick, sur la défensive.

— Parfois, si. »

Il comprit enfin, au niveau subconscient, ce qu’elle voulait démontrer.

« C’est comme ça que votre mari est mort, n’est-ce pas ? »

Elle se détourna et regarda de l’autre côté du bar presque vide, vers la table de billard.

« Oui. Vous avez raison.

— Je suis désolé. J’ai dit ça sans réfléchir. Un instant, j’ai oublié…

— Je l’ai bien cherché. »

Un long silence retomba entre eux deux, pendant que le juke-box jouait un disque et que les boules de billard s’entrechoquaient par intermittence. Nick avait honte non seulement de ce qu’il avait dit, mais aussi de l’avoir proféré dans le bar de son hôtel, ce lieu si sympa où les gens venaient tuer quelques heures pour s’ennuyer un peu moins que chez eux – bien que l’ennui finisse toujours par l’emporter. Il avait honte d’être toujours là, à Bulverton. D’agir comme il le faisait, des verres qu’il servait, de se cramponner ainsi à Amy, d’avoir tellement peur de l’avenir.

Finalement, Teresa rompit le silence.

« Puis-je avoir mon bourbon, maintenant ?

— O.K.

— Non, je n’en veux pas. » Puis elle se ravisa et poussa son verre dans sa direction. « Ou alors, un seul. »

Les Extrêmes
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